Mysteres de la langue hebraique

 

• Accueil • Remonter • Mysteres de la langue hebraique • Le Pouvoir des mots •

 

 

Les mystères de la langue hébraïque

1-Les mêmes lettres, signification différente

2-Les mots à sens contraire

 

Nous avons vu dans le passé, de nombreux cas où  deux mots composés par  des consonnes identiques  qui ont cependant des sens différents. Cependant cette différence de sens n’est qu’apparente. En réalité- et c’est en cela que réside le génie de la langue hébraïque- ces sens différents ont  en filigrane beaucoup de rapports entre eux.

Pour illustrer cette particularité  de la langue hébraïque nous avons analysé les  consonnes « noun », «  guimel » et « ‘ayine. Ces trois lettres forment les mots « Onègue » qui signifie plaisir, désire et le mot  « néga’ » qui signifie une plaie. Dans l’exposé qui va suivre nous étudierons les mots composés par les lettres suivantes : Chine, pé, et ‘ayine. Avec ces trois lettres on peut former les mots suivants : Pécha’ qui a donné en français  le mot péché ; et on peut former aussi le mot chéfa’ qui signifie abondance richesse

Le rapport entre ces deux sens est évident. La richesse et l’abondance peuvent conduire un homme à commettre  de nombreux péchés. On en trouve une indication dans la Torah. En effet, on peut lire dans le testament de Moïse : « Israël  s’engraisse et se met à regimber » ( Deut.32, 15. autrement dit,  quand quelqu’un devient très riche et dispose de tout, en abondance, il est conduit à négliger autrui et  vouloir satisfaire ses pulsions narcissiques au détriment de la couche de la population la plus démunie.  C’est exactement ce qui arriva à Israël après la sortie d’Egypte. L’accumulation des biens, de l’or et de l’argent  par ceux qui sont sortis,  a conduit à la faute du veau d’or ( Deut. I, 1.

Parmi les trois lettres qui font l’objet de notre propos nous comptons la lettre ‘ayine qui signifie œil. Cet organe est souvent accusé de beaucoup de maux. C’est lui qui véhicule le désir, c’est lui qui est à l’origine de la plupart des pulsions. Le fait de poser les téfilline le matin entre les yeux, constitue un rappel dans ce sens avant d’entamer les activités de la journée. A propos de la  « richesse » (chéfa’) on peut lire dans le  pirké avoth : « Quel est l’homme qui mérite d’être qualifié de riche ? C’est celui qui est content de son sort, ainsi qu’il est dit (Ps.128, 2 ) : « Si tu te nourris du travail de tes mains, tu seras heureux et content. autrement, toute personne qui maîtrise  ses pulsions génère le sentiment de satisfaction  personnelle. L’absence de cette maîtrise  est la cause de l’insatisfaction et du mal être. Celui-ci est de nouveau générateur des besoins à satisfaire et c’est ainsi qu’on  verse dans le péché. On passe de chéva’, très facilement, à pécha’.

Si l’on renverse les consonnes qui composent le mot chéfa’ on obtient le mot ‘apech qui signifie «  moisir, faire moisir, pourrir. C’est une manière de nous mettre en garde  que la richesse (chéfa ) peut conduire un homme à la dégradation et à la régression s’il oublie que sur cette terre il n’est que le dépositaire des biens que lui a confiés l’Eternel.  Sans prise de conscience que l’homme n’emporte rien avec lui l’abondance (le chéfa’) peut le conduire au ‘éfèche à la moisissure c’est à dire à la dégradation de sa personne, et par la suite il versera dans le péch’a. Comme on peut le constater la langue hébraïque n’est pas seulement une langue vernaculaire mais elle est construite de manière à transmettre le fondement du Judaïsme. C’est pourquoi la pensée hébraïque ne peut être légitimement transmise  que par la langue hébraïque. Comparons la notion de ‘onèg  dans la conception du chabbath. Le Juif est tenu de faire de sa journée du chabbath un jour de délice, de joie d’aménité, de repos. Cependant  le plaisir, le ‘oneg  ne doit pas dégénérer en  conduite immorale. La conception du monde occidentale est tout à fait antinomique avec celle  du judaïsme. Le plaisir est celui des fêtes des danses, des boissons, de l’oubli de soi,  comme on peut le constater dans les carnavals, où pour exhiber toute l’animalité de l’homme, on est obligé de se masquer pour ne pas être reconnu. Toute cette conception du judaïsme comparée à celle du monde occidental se trouve en filigrane dans le mot ‘onèg (délice, plaisir. Ce dernier est composé de trois lettres ‘ayine, noun, et guimel. Si nous prenons les lettres viennent immédiatement après ces lettres nous obtenons : après ‘ayine il la lettre  ; après noun il y a samèkh ; et après guimel vient Daleth. Avec les lettres pé, samèkh, daleth on obient le verbe héfsèd  qui signifie se dégrader, se perdre. C’est à  la situation de dégradation que l’on aboutit lorsque le plaisir est conçu comme un oubli de soi.

Les  Mystères de la langue hébraïque (suite)

En psychologie, la structure mentale est cyclique. Dans ce système les extrêmes  se touchent. C’est ainsi que l’amour  et la crainte  procèdent de la même source. Il en est de même du rire et des pleurs, de l’avarice et de la prodigalité, de la glace et du feu, tous les deux brûlent etc. Les antinomies   qui traduisent un caractère ou un sentiment sont exprimées dans la langue hébraïque par des mots  qui se complètent, pour mettre en exergue l’union des extrêmes. Prenons par exemple, les deux sentiments : l’amour et  la crainte. Le premier se dit en hébreu  « AHAVA » et le deuxième  « Yir’a »ce qui donne l’illustration suivante :

ה א ר י                                           

ה   ב  ה  א                                                             

Ces deux  mots se retrouvent lorsque nous  joignions les deux premières lettres du premier et les deux premières lettres du second. Il en est de même avec les deux dernières lettres des deux mots. Nous pouvons constater que  la moitié d’un  mot complète l’autre. Ce qui signifie qu’il n’existe pas  un caractère  sans les deux  antinomies. C’est donc la raison pour laquelle le Judaïsme nous prescrit de ne jamais juger son prochain. Tout jugement, est obligatoirement fondé sur une seule facette d’un problème. L’Eternel  peut seul sonder les cœurs et les reins parce qu’il perçoit la globalité de l’être .D’autres parts, la face négative d’une situation peut être très précieuse pour comprendre la  face négative . Dans le cas qui fait l’objet de notre propos , la crainte peut conduire à l’amour . La torah fournit une illustration quand, d’un côté elle écrit « Tu craindras ton D. » (Lev.19,14) ,et de l’autre « Tu aimeras l’Eternel ton D. »(Deut.6,5) cela revient à dire que la crainte est le premier sentiment de départ qui doit se transformer par l’étude de la torah et  l’observance des Mitsvoth , en amour de D. .Cette métamorphose est inéluctable , parce que dans la crainte il y a de l’amour et dans l’amour il y a de la crainte

On peut également expliquer par ce même système la pensée des « chapitres des pères »(Pirké Aboth )exprimée en ces termes : « S’il n y a pas de sagesse il n’a pas de crainte et sans la crainte il n’y a pas de sagesse »(chap.3,21) .Ce qui revient à dire que la crainte et la sagesse doivent obligatoirement cohabiter ensemble .Mais dans ce cas comment peut-on  intégrer les deux sentiments si l’un dépend de l’autre ?  Il faut donc admettre qu’il existe des degrés divers dans la crainte .On peut   respecter une loi par crainte de la sanction ou du gendarme . On peut  l’observer parce qu’on y adhère par la raison .Il en est de même pour la crainte de Dieu . On peut  le craindre parce qu’on est superstitieux et on peut le craindre parce qu’on  parvient à saisir toute sa grandeur , sa magnanimité et sa bienveillance envers les créatures .

Ce qui est valable en hébreu pour les sentiments est valable aussi pour les noms propres . Prenons le cas de deux noms mentionnés dans la Torah .Le premier est Bil’am  et le deuxième est Amalek .en hébreu :

ם  ע ל ב

ק  ל מ  ע

on retrouve  dans ces deux personnages ennemis d’Israël  une complémentarité parfaite  ,bien qu’ils fussent opposés dans leurs méthodes .Amalek représente la violence gratuite , la lâcheté , la fureur de massacrer ,l’absence de tout sentiment humain .Alors que Bil’am est plus raffiné dans sa volonté de faire périr le peuple d’Israël .

A l’instar du premier cas , les deux premières lettres du premier nom jointes aux deux premières lettres du deuxième nom forment le nom complet d’un des personnages .Il en est de même pour les deux autres lettres . L’enseignement qu’on peut en tirer est le suivant . La volonté de supprimer le peuple juif prend plusieurs formes .Certains s’attaquent à lui physiquement , et d’autres moralement . Mais le résultat souhaité est identique . L’histoire a démontré que les deux méthodes ont échoué parce que la pérennité du peuple juif est inscrite dans la Torah .Ce qui émane de Dieu ne peut être modifié que par D. Les hommes n’y pourront rien .Le peuple juif survivra à toutes les haines des nations parce qu’il est porteur du message divin . 

Rav Haïm Harboun

Les mots à sens contraire

Il n’existe pas  de situation  qui ne présente que des avantages  sans le moindre inconvénient . Chaque action  doit donc être entreprise en tenant compte du rapport existant entre l’avantage et l’inconvénient . Un médicament peut  guérir comme il peut aggraver la maladie . La langue hébraïque comporte beaucoup de mots qui ont  deux sens contraires . La Torah en attribuant deux sens contraires à un mot veut transmettre un message et un enseignement précieux . Pour illustrer notre propos nous donnerons ci-après  le cas du mot  « néga’ » qui signifie  , blessure, plaie, maladie  .On peut lire en effet (exode 11,1) : « Il est une plaie (néga’) encore que j’enverrai à Pharaon » ou encore :«  Le Pontife  examinera cette affection (néga’) de la peau »(Lév.13,3)

ou encore : « Si une famine survient dans le pays …. Une maladie ( ‘néga’) des blés »(1 Rois 8,37) .

Les mêmes lettres du mot Néga’ forme le mot « oneg » qui signifie plaisir, délice, agrément ,exactement le sens inverse de « néga’ ».tout le monde connaît le « onèg chabbath », autrement dit : l’obligation de faire du chabbath un jour de joie, de repos de l’âme .Quelle leçon peut-on retenir de ces deux constructions avec les mêmes lettres ?

La Hatam  Sofère dans son commentaire sur la péricope  bé’houkotaï

(Commentaire Torath Moché 3em édit.) écrit : « Avec les lettres du mot « onèg »on peut composer les mots suivants :’Edenn Nahar (fleuve) et gan (jardin)qui figure dans le verset : « Un fleuve sortait d’Eden pour arroser le jardin(gan) »( Gen,chap.2,10) . Ces trois mots auraient du être dans un ordre plus logique à savoir : « Eden en premier lieu , car  c’est là la source de l’abondance et du bien , puis fleuve , qui  véhicule l’eau indispensable à toute culture , puis vient le mot gan (jardin) qui constitue  le réceptacle .Tant que ce processus fonctionne convenablement  le «  Oneg » s’instaure dans notre monde .Mais si un obstacle venait s’insinuer dans ce système alors ce sera le « néga’ » qui dominera .La sécheresse entraînera la famine et en conséquence la maladie .

Le jour que la torah nous a désigné pour en faire un jour de repos et de délices  est et jour du Chabbath (Isaïe 58,13)Ce jour le juif rentre en possession d’une âme supplémentaire qui lui procure une ascension dans la spiritualité . Ce jour aussi il y a un repas de plus pour qu’on est l’occasion d’être de nouveau ensemble pour étudier la Torah ,  et chanter les mélodies du chabbath .     Le jour du chabbath le juif arrête le temps , cet ennemi implacable de l’homme .Il écarte toute tristesse , il met en latence tous ses problèmes . Le chabbath le juif subit une véritable métamorphose , il oublie tout esclavage pour devenir un prince , l’étude ,la joie ,le dialogue avec ses enfants , la prière , tout cela contribue à faire de ce jour  un temps de D.

Cependant , si une personne manque de volonté , et ne peut résister à entreprendre un travail interdit , si elle occulte tout repos , toute joie , s’il  fait du chabbath un jour ordinaire , alors il remarquera que de « Oneg » il passera à « Néga’ ».C’est la routine qui continuera  , c’est la course au matériel qui prendra le dessus avec toute sa cohorte de déceptions, de déprime , d’énervement , d’occasions de proférer de la médisance et le « néga’ » a été justement introduit dans la Torah comme punition de la « tsara’ath »,de la médisance . Comme on peut le constater il est dans le main de l’homme de faire de savie un gan éden  et un enfer et ces deux termes procèdent des mêmes lettres .Il appartient à l’homme de respecter scrupuleusement l’ordre que l’Eternel a prescrit .Cet ordre figure dans  la Torah .Tout écart de cet ordre peut  générer une situation difficilement gérable .Le chabbath procède de l’ordre divin ,Israël doit l’observer pour que le chabbath à son tour puisse le préserver .