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On peut lire dans le Midrache Rabba(Routh 5’) : « Rabbi Yits‘haq dit : si un homme accomplit une Mitsva, il doit le faire de tout son cœur » A première vue on ne comprend pas ce que Rabbi Yits’haq veut dire. En général un homme accomplit une mitsva de bonne grâce. On ne voit pas ce qu’apporte le commentaire de ce maître. Par ailleurs, nous ne savons pas non plus, de quelle mitsva s’agit-il. On sait qu’il y a deux classes de Mitsvoth dans la Torah : les mitsvoth formulées négativement, et les mitsvoth formulées positivement. Rabbi Yits’haq ne précise pas, non plus, à quelle catégorie de mitsvoth fait-il allusion. La suite du Midrache nous aidera à comprendre la pensée du Maître « Car si Réouven savait, Il aurait pris {Joseph} sur ses épaules pour le conduire auprès de son père, et si Aaron savait que l’Eternel lui ordonnait d’accueillir son frère Moïse il serait sorti avec des tambourins en dansant en l’honneur de sa venue ; et si Boaz savait que l’Eternel lui ordonne d’épouser Routh, il aurait offert à cette dernière du veau à manger »
Pour comprendre la pensée de Rabbi Yitshaq il est indispensable de se rappeler de la mitsva accomplie par Réouven, lorsqu’il s’est rendu compte que ses frères allaient jeter Joseph dans un puits ; le texte dit : « Réouven apprit {Ce que ses frères avaient dans l’intention de faire }et sauva Joseph de leurs mains. »(Genèse 37,21.)
Aaron a son tour en accueillant son frère Moïse de retour en Egypte, ne savait pas qu’il serait le porte-parole de son frère. Il s’est donc conduit selon sa conscience et l’affection qui le liait à son frère. Cependant il ignorait que l’accueil qu’il doit réserver à son frère était prescrit par D. ce qui revient à dire que la qualité de cet accueil, déterminera la liberté pour les hébreux esclaves en Egypte.Il en est de même pour Boaz, il ignorait que la fille moabite qui suit sa belle-mère Naomie dans la souffrance sera la figure emblématique de toute personne qui embrasse le Judaïsme.Boaz ignorait aussi que la Moabite sera l’ancêtre de notre roi David.
La Torah n’est pas un recueil de contes individuels, elle relate uniquement ce qui aura un intérêt certain pour l’ensemble du peuple juif. La Torah est pérenne par conséquent son enseignement restera éternellement vrai. En relatant des événements qui se rapportent à des particuliers, elle nous met concrètement face à un enseignement qui touche à la spiritualité la plus transcendante. Prenons le cas de Réouven, il s’est trouvé dans une situation où il devait faire face à plusieurs Mitsvoth à la fois. L’obligation de porter secours à son prochain quand il est en danger, le respect du père et de la mère. Mais au moment où ses frères décident de jeter Joseph dans un puits, sa pensée était de sauver son petit frère. Mais, dans une perspective historique. Réouven a sauvé le peuple hébreu tout entier. Quant à Aaron ,il n’a pas vu son frère réfugié à Midiane durant soixante ans.
Le retour de Moïse en Egypte après soixante ans d’absence, était pour Aaron une sorte de regroupement de famille. Mais dans une perspective historique, l’accueil réservé à Moïse, a été à l’origine de la sortie d’Egypte.Moïse avait dit à l’Eternel « Je ne suis pas un orateur, et l’Eternel lui répondit, cette fonction sera attribuée à ton frère Aaron. Cet argument a entraîné l’acceptation de Moïse de prendre en charge la direction du peuple d’Israël.
Nous pouvons maintenant comprendre la réflexion de Rabbi Yits’haq, qui nous exhorte d’accomplir la mitsva de tout notre cœur. Personne ne peut savoir ce que cette mitsva provoquera dans le temps . Notre réflexion est limitée car l’intelligence de l’homme en général est aussi limitée. Mais lorsqu’on accomplit une mitsva avec cœur, conscience, amour d’Israël, crainte de D. elle s’intègre dans l’histoire et ne sera plus une action individuelle mais une part de chacun de nous dans la construction d ‘un monde meilleur et dans la confiance dans l’avenir d’Israël.C’est ainsi que chacun mitsva aussi anodine sera à nos yeux procède à la délivrance future du peuple témoin de D. sur cette terre